Vendredi 9 novembre 01, Samâdhi AM

Les forces adverses sont les forces de la mauvaise volonté. Ce sont les forces d’obscurité du non-voulant, du non-avançant.
Ce sont les forces restrictives du Mental, du Vital et du Physique qui se refusent à vivre la lumière en leurs corps, qui refusent la transparence rédemptrice et “transmuante’’, qui refusent la possibilité à l’être de vivre le Réel, cette vérité du Ciel en la Matière. Il y a si peu d’êtres qui soient conscients de ce que ces corps qui les constituent se peuvent être et réellement empêcher d’être véritablement. De cette ‘nescience’*(1) , de cette Ignorance, c’est inutile d’aller chercher ailleurs des pouvoirs occultes générateurs d’obscurcissement, les origines premières sont là, présentes en chacun, en le nœud même de leur propre ignorance. Laissons les visions des grandes forces adverses destructrices à ceux qui se peuvent voir et travaillons à l’humilité de nos réalités encore bien suffisamment petites sans avoir à les réduire encore d’un peu plus d’orgueil d’une connaissance que nous n’avons pas. C’est là le début d’une grande sagesse qui donnera à découvrir suffisamment tôt les grandes puissances qui nous dirigent et nous gouvernent .

(1) Nescience : mot semble-t’il inventé par Sri AUROBINDO comme ayant pour sens négation de conscience, peut-être quelque chose comme une anti-matière pour la matière ?

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C’était un jour sauvage de douleur, un de ces jours ou la Vie semble absente à tout jamais, un de ces jours qui semble anéantissement de l’être, un jour comme tant d’autres si lourd du poids de la banalité du commun.
Et… petite flamme s’éveilla en les profondeurs même de cet obscur, comme la mémoire infime d’une réalité enfouie sous tant d’inconnues, la force était là qui réclamait son dû, qui revendiquait à sa reconnaissance, si tant repoussée, si tant étouffée, si tant refoulée, et ce feu du sentiment se gonfla de la souffrance, empressa le cœur ému de tant de suffisances, et sous les pleurs encore incertains de la rétention et de négation, s’éventra et s’épancha de tant de contention en la flamme purificatrice de libération.
De ces jours où le temps est triste et l’âme grise, il est des retournements qui nous sont énigmes, les vêtements Janus des oubliés de notre être, le ciel qui se cherche en la Réalité ignorante. De ce gris que porte la lumière, nous sommes encore flamme de certitude qui se porte l’obscur de nos envoûtements sombres. Pourquoi se désespérer, il est des jours de soleils et des jours de pluies, et ciel pleure et terre se boit sa tristesse et ciel rit et terre se réjouit.
Notre cœur se porte le soleil, notre âme la flamme secrète de ses rayons et notre terre se “permée’’ de ses humeurs d’un Incertain pourtant prédestiné. Il n’est que de se goûter cette geste de mouvances d’une quête qui nous échappe de l’encore et qui pourtant se cherche un chemin en nos êtres sibyllins.

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On en arrive à ne même plus s’étonner de l’immense de l’architecture d’une feuille d’arbre, on en arrive à ne même plus s’émerveiller de la beauté d’une fleur, on en arrive à ne même plus se trouver goût humble de vie en notre être. Comment se peut-il être, devant l’immensité de la création qui nous est révélée et d’y participer ? Quel est cet étanche qui nous coupe de ce Réel qui ne demande qu’à être, ce vibrant de chaque cellule de l’univers qui s’émeut encore pourtant de l’oubli de sa misère, sommes-nous donc voués à ce silence mort de la récurrence obscure de notre non-entendement ?
Il est un rayon de soleil qui se cherche en le labyrinthe de notre ombre, il n’est que d’en être le guide secret en le feu témoin de notre âme, il n’est que de nous oublier, il se peut prétention d’être et de s’ouvrir à cet Inconnu si connu de son éternel Présent filigrane. C’est là, c’est tout à côté, c’est juste derrière la porte de notre encore volonté, cela n’attend que nous ne voulions plus rien, que nous n’attendions … plus rien, que nous nous soumettions enfin à ce simple si ‘trop simple’ de nos certitudes si tant “bêtonnantes’’ et assassinantes de Sa Vérité.
C’est une petite fleur à l’image de notre âme, comment se peut-il que nous ne soyons pas étonnés de l’architecture immense d’une feuille d’arbre et que nous ne soyons pas étonnés de la beauté de la fleur de notre âme ?

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Faut-il que nous soyons épais et entretenions quotidiennement du compost de notre ignorance cette épaisseur pour que nous soyons si aveugles et insensibles vraiment !

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Vendredi 9 novembre 01, Samâdhi PM

J’ai vu des traces d’or sur les pas du chemin…

Comment se peut-on gaspiller ce temps de vie qui est déjà si court et si précieux à lui-même pour son propre mouvement, pour sa propre stabilité ?…
Je ne savais pas qu’il se pouvait y avoir de l’or sur les chemins. Un hasard Tout-Vivant, un caprice de la Circonstance, une pierre d’achoppement, décidément les chemins ne sont pas sûrs du tout, me fit faire première trébuche et mon œil droit heurta l’éclair d’un éclat d’or brillant en la poussière qui déjà recouvrait le fait. Rêve, hallucination ? J’eus beau fouiller, je ne le retrouvais pas, il se fut farce d’un Destin soucieux et capricieux, je n’en demandais pas plus, pas plus soucieux, mais néanmoins certainement plus capricieux que lui. Je n’avais jamais pris véritablement les chemins, ces lignes parallèles de mon enfance qui se rejoignent à l’infini paraissaient à mon intelligence quelque peu vision sulfureuse et dogmes troublants plus que m’attirant. En fait ce furent eux qui me prirent et me menèrent. De hasard en hasard, il se firent sentiers quotidiens de mes pas, et des grandes routes larges et fréquentées des foules, j’en vins, sans doute de par une nature solitaire à préférer les sentiers étroits et ombragés de l’oubli. Autres pierres ne tardèrent pas à me rappeler ma hauteur d’homme de cette terre et mes bassesses, il n’en est point à douter, n’est-ce pas !… la pâte humaine est ainsi. Pourtant hasard curieux et non moins notable, les chutes dont témoigna longtemps l’état tuméfié de mes genoux se firent de plus en plus rares et paradoxalement s’accompagnèrent de la découverte d’un presque filon aurifère de plus en plus riche. De ce grain entrevu il y a si longtemps, je découvris petite pépite encore palpitante de la sinuosité de ses cavernes et de sa joie de goûter le rayon de soleil du jour de sa découverte. Il subsistait là un mystère qui ne se pouvait manquer de me troubler de par ces causalités à effets. Il y eut toujours cette joie de percevoir dans ces traces du hasard non pas l’écriture d’un or vil matière mais cette brillance si tant parsemée de vie palpitante et de lumière clin d’œil qui courait légère et presque impertinente sur les pages “chemines’’ de ma Vie.
Je me dois cependant avouer que le phénomène se répétant parfois, selon les périodes de ma vie de façon récurrente et accentuée, j’en vins à me demander si je ne pourrais pas faire de ces chutes hasardeuses de ma vie l’opportunité du métier d’orpailleur qui se pourrait joindre à l’essentiel de ma joie l’utilitaire de la vie matérielle de mes jours. Ce fut en fait très simple, de cette pensée annoncée, comme par hasard, les chemins que je parcourais ne laissait plus nulle pierre en travers de mes pas, je ne trouvais que fleurettes et tendres pelouses douces et bucoliques dont je me lassais vite, je ne sus trop bien pourquoi ?
Peut-être perçus-je en quelque part secrète de mon être qu’il y avait une certaine relation de cause à effet et donc que les chemins que je prenais n’étaient pour moi que de piètre intérêt. Ce fut certainement à compter de ces temps qui me furent tant d’incompréhensions si douloureux, que je sentis inconsciemment mon corps réclamer cette “extasie’’ qui lui était devenue si tant nourriture essentielle, que je me découvris, sans l’avoir aucunement prémédité, par hasard donc, stupéfié et affalé, hanche et front baignés de sang, au beau milieu d’une petite sente de montagne que je n’avais pas vu mes pieds engager. Ce fut là pourtant un jour de Vie, entre les paupières de sang frais “encoagulées’’, je perçus la magnificence d’un quartz pailleté d’or pur et vierge de sang vermillonné, qui m’avait entaillé l’entre-sourcil. En ce même temps de ce regard de terre et de surprise, je vis en une vue intérieure mais comme extérieure à ce regard humain, entourées de masses noires comme d’une cécité, deux taches aux formes de cercles rudimentaires, taches de la puissance d’une beauté bleu-azur à la lumière incomparable qui se fondirent en une seule forme frangée d’un ourlet d’or vivant qui flottait et vibrait en l’obscur de l’espace alentour. Ces deux réalités se fondirent en une seule expérience, ce jour là, or de Terre et or de Ciel se rencontrèrent des jeux d’un destin curieux. Je goûtais cette joie nouvelle du Hasard qui me fit rencontrer là ce merveilleux, ce là où bien sûr, loi des paradoxes, je m’y attendais le moins. Las, mon souci s’agrandit à compter de ce jour de révélation non encore intégrée de rechercher les chemins et sentes les plus solitaires et paradoxalement de ne pas désirer penser à ce qui pourrait s’y dérouler ou advenir puisqu’il semblait y avoir une logique à cette loi capricieuse de la découverte.
Ce Temps fut là encore un de ces temps de l’Impossible, impossible parcellé des tentatives avortées et des hasards fabuleux de la découverte, l’or apparaissait et disparaissait, Matière et Esprit se faisant répons alternatifs sur le mode-partition du fragmenté chaotique d’une loi pour le moins insaisissable du pur caprice de mon Ignorance.
Ainsi s’écoulèrent les temps d’une vie, cette petite flamme qui parfois tant s’éternise du rien et du néant et qui tout soudain se réveille passionnée et en ardent désir de n’en pas laisser une miette. Je me pris le goût et l’habitude de sagesse de laisser mes pas se choisir leurs chemins et m’en trouvai fort bien ; les pierres se firent plus disparates et respectueuses, mon pas avait trouvé son assurance véritable de pas d’homme affranchi des lois de gravité et de la pesanteur et ma vision s’azura davantage de sa frange-or qui se fondait enfin en la perspective d’un noyau cosmique en l’infini, vaisseau de mon esprit de matière glissant au travers les infinitudes d’un Espace “auré’’.
De ce passage de l’or de terre à l’or sublime de ciel, il me fallut plonger en les chaos de l’Incertain, me laisser patiemment par mes résistances d’acier et de plomb, découvrir en la vie de ma substance d’homme le chemin vibrant et vivant de la lumière, ce pétillement si singulier, ce pointillisme cellulaire infini de nos sœurs de la nuit, là, en moi, à portée de la main de la vision, et sans renier les beautés de Nature, je me dirigeai vers celles qui m’étaient devenues si intimes, en la joie frange-or de mon sang cramoisie, et les plaies désormais fermées et guéries de mon âme assagie.

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Le corps est l’outil, l’instrument, l’objet, le moyen, le passage, l’intention, le frein, le blocage, le filtre, le tamis, l’acteur, le passeur, l’expression, le traducteur, l’acteur, l’enfant, le compagnon, l’incrédule, le connaisseur, le vibrant, le gêneur, l’encombrant, LUI !

   
         
 
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