Vendredi 4 janvier 02, Samâdhi AM

Les fantômes d’un passé se sont évaporés. Il reste, accrochés en les replis des gestes de l’appris et de l’habitude, les traits récurrents de la page cornée ou froissée. Ce sont plis quasi-incarnés, ce sont gestes enfouis de l’us et de la coutume qui n’ont de répit que de n’exister. Ce sont formes d’une pensée d’un jeune Dieu claudiquant en marche, qui se prit béquilles ou bâtons divers du soutien, ce sont les outils fabriqués à l’abyme de notre souffrance pour continuer néanmoins le chemin. Ce furent pied troisième de l’empreinte torse et déviée de notre claudication.
L’aide d’un temps s’en devient le poids pesant d’un corps-mort du présent, les nécessités du passé ont fossilisé et enchâssé la pureté vierge du mouvement originel de l’Instant. Il est page à décorner, à déplier, à repasser de la vision nouvelle de l’instant, laissant blessure-cicatrice en les plis du passé, des pages lues et assimilées. Il est mémoires qui s’effacent, plaies aujourd’hui fermées d’un corps plus incarné, il est des poids et pesanteurs antiques qui se sont détachés, il est un corps en marche aux pages nouvelles qui s’écrivent des souffrances et douleurs obligées des blessures anciennes. Le pli de l’âme de la page cornée nous restera le signe d’attention d’une date, d’un jour, d’un temps, de notre impossibilité de continuer. Ce sont là points de repère jalons de notre trajet, les marques tangibles d’un lieu de difficulté. Il n’est nul pli de l’inutile, c’est là symbole filigrane qui s’inscrivit en le corps froissé ou corné de la page d’un temps secret et handicapé des pas de vie.
Il est dans la nouvelle ou le roman d’une vie nombreux signes de la remarque : ce sont signets, annotations de marges, plis, griffonnages, soulignements et salissures, ce sont là marques de l’attention des expressions de nos passages de l’ambigu et de la réflexion.
Gestes engravés et inscrits en la mémoire plein-corps du papier-page, notre être les porte en traces intimes secrètes des désirs impérieux de la vie, ce sont lettres-corps-cicatrices manifestes de l’âme, les laissés-pour-compte bientôt méconnus sans gloire d’un champ de bataille oublié.
Abîmée, froissée, déchirée, salie ou cornée, notre page de vie se garde empreinte et mémoire de nos souffrances et arrêts, il est encore page vierge nouvelle à tourner et… à décrypter.

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Vendredi 4 janvier 01, Samâdhi AM et PM

Nos corps se portent la mémoire secrète de leur mission. Ils ont incarné en les plis de souffrance vive de l’âme les gestes de leur trouble. Notre être se vit les pages scriptes occultes des écrits corps et âme des pas de Karma et destinée. Nous exprimons d’écritures torses et du trait-griffon confus l’Écrit incohérent et incompréhensible de gestes inscrits en la chair “avive’’ tourmentée de notre substance divine. Pages entachées du sale et de la rature, secrets de derrière le voile qui se voient le jour, diables et démons rouges de honte se prennent l’“ensoleil’’.
Nous écrivons sur le livre des jours et saisons les états griffonnés de notre Ignorance, quêtant l’espoir d’un reflet or-argent du jour pour nous révéler le Sens.
Nous sommes le langage exprimé d’une Conscience qui nous pose en les pas incertains et pourtant assurés de notre destinée, nous suivons en aveugle ces sentiers esquissés, soucieux d’avancer et contraints cependant d’exister de tant de cécité imposée. Barrages papier-mâché de vertu et bonne conscience sont écartés, évincés et balayés d’un désir de page plein-ciel sans nuage.
Nous faisons offrande aux jours de nos peines de la plaie vive de notre Inaccompli aux lèvres pures de l’Ignorance et de l’Inconcevable.
Il est des jours où nous avançons en plaie béante, les jours de nos cécités abstruses et sibyllines, ces jours des coupures profondes de Dieu. “Incis’’ de la ciselure de la souffrance, nous errons en mendicité dépenaillée, en quête pourtant inconditionnelle de notre refus encore de Dieu.
Lieu autel-sacrifice de notre errance, nous aiguisons les rivages de nos plaies des vastes mers et océans de l’exil. Notre être tout entier est un corps qui se tend, s’étire et se tord sous l’Énigme, cherchant sous l’arc-en-ciel tétanique un soleil guérisseur.
En les plis des langues voilées de Matière, nous cherchons la fécondation libératrice de l’Esprit de Dieu. Il est cet espace manquant vide du trait d’union d’une “reliance’’ d’esprit, qui s’agite et se trouble des forces brutes de Matière et se cherche l’En-plein, l’alchimie secrète de la cicatrisation.

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Encore une fois le passage est obstrué.
Nœud coulant des cordes et filins acier de Temps et de Karma, en les rives d’un quelque part manifesté. Coulées de sables opaques des terres argile de l’humide ont scellé les galeries du puits de mine. La coulée or des désirs du ciel s’étale de son amour, soudain inutile. Vague et “déferlence’’ d’un feu Éros brut, envahissent les galeries, inondant, noyant de leur incendie la solitude éternelle de Dieu. L’être, voué et coupé d’impuissance du fait, s’embrase de la Douleur de sa réalité.

   
         
 
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