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Mardi
18 décembre 01, Samâdhi AM
Il est ces jours de pluie de l’à
verse et de la bruine. Il y a ce matin en l’aube naissante de ce
jour nouveau la présence d’une lumière encore humide,
qui nous entraîne déjà vers un soleil à venir
et nous montre nostalgie de cette terre nouvelle, humus qui s’en
va amender le sol de sa mort et offrande. Ces cycles traversent le langage
subtil de nos corps, de nos vies.
Morts et résurrections, travail immuable et perpétuel qui
se trame et se fait à notre insu s’il ne se fait en conscience.
Notre “perméation’’, notre accord, notre acceptation
nous développent, nous enlèvent ces enveloppes-voiles de
nos peaux de terre usées et obsolètes désormais.
Nous sommes la pâte brute et grossière, tout juste sortis
du moule matriciel, il est maintenant ce lent travail cosmique qui se
traverse de labeur cette substance encore inerte et “irresponsive’’
de vie véritable. Conscience œuvre, un poumon en forge qui
dilate et soulève les ombres. C’est le lent œuvre alchimique
de transmutation, c’est la lente découverte de la nature
de chaque corps qui “tégumente’’ cette réalité
de nos êtres, c’est l’œuvre de purification, de
décantation et de séparation.
Ces vieux habits qui nous ont si bien vêtus du décor ou de
la richesse de leurs illusions, ces vieux habits-valets qui se sont devenus
parts vivantes de nous-mêmes, qui se sont faits corps-service, nous
nous surprenons, un jour de réalité, de nous découvrir
tout soudain pour eux tendresse et attachement, de ce jour où ils
se doivent tomber et où nous nous devons de nous en séparer.
Ce sont ces parts intimes de nos êtres, ces parts qui ont si tant
œuvré et eurent leur temps de gloire et de réalité,
ces parts qui se doivent mourir et servir de ferment à vie nouvelle
à venir, parts laissées à l’abandon d’un
bord de chemin aux pas-engrenage des cycles en marche, ces parts qui ne
nous appartiennent plus.
Et nous nous devons de descendre chaque fois davantage en les profondeurs
d’inconscience de nos tissus, chercher ces vieilles toiles de morts
qui couvrent de chape et devenir et réalité. Nous sommes
pétris et soumis à cette grande respiration de Vérité
qui, sur son boulier des jours et saisons, nous calcule rythme-corps-singulier,
nous faisant découvrir sous chaque peau de mort lumière
assoiffée plus profonde et véritable.
Il est des habits qui sont chaîne solide et trame vive colorée,
ce sont ces filets de mort de la servitude, ces rets cage d’acier
grossièrement peints dorés, ce sont ces pourvoyeurs de nos
morts physiques véritables, ces tueurs à gage du ‘mort
ou vif’, que nous nourrissons chaque jour davantage de nos inconséquences
et servilités. Il est des temps de la vie et de la mort, des temps
de la rencontre et de la séparation, ce sont présents du
temps d’une conscience qui s’offrait à Devenir ; Nous
en avons charge, gestion et responsabilité, nous sommes en quelque
temps et lieu-espace ce corps à naître, cette nudité
à retrouver, ce langage originel de Sa volonté et destinée
au singulier.
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Mardi 18 décembre 01, Samâdhi
PM
Faisons traversées en voies
d’incertitude et d’inconnu. Là, nous ne savons plus,
là il est de se laisser dérouler le fait et le laisser parler
et placer ses pièces, lui laisser tour d’avance sur l’échiquier
de notre in-connaissance.
Chemin aujourd’hui inconnu que nous nous devons nous-mêmes
de baliser et marquer de nos propres traces et repères, la voie
de l’autre pourtant si similaire ne se peut servir, il est expérience
nécessaire, cette vérité du fait, cet accompli en
conscience.
Il est de descendre sur le crêt des cycles du Temps le long du tronc
jusqu’en racine d’Ignorance, se laisser envahir et “perméer’’
du fait.
En cet espace de lieu d’aucune carte-géographie déjà
tracée, prendre points de repères et azimuts et esquisser
la carte-paysage de notre réalité.
De découverte en découverte se laisser élaborer nouvelle
géographie aux marais sables-mouvants et ruisselets chantants et
coins de ciel bleu. Cartes-géographie pionniers d’un temps,
ponts points de suspension des pas futurs trois dimensions sur la spirale
ascendante de notre vie microsillon, pas déjà faits qui
ne seront plus à inventer, tout au plus de recopier, nous permettant
d’anticiper et raccourcis et obstacles gênants, vers un but
toujours autant inconnu vers lequel pourtant nous sommes aspirés.
Il est cette nécessité de s’en remettre à QUI
sait, là où de fait nous ne pouvons pas savoir, là
où vie s’invente et se crée en le cœur même
de ce que nous sommes et que nous ne connaissons pas encore.
Pas-empreintes de Hasard et Destin d’un présent qui nous
échappent, il est d’oser y mettre pied, et s’enfuir
sur les routes du Temps vers notre propre destinée, celle qui EST.
Pas de Hasard, goût incertain d’Inconnu, …
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Mardi 18 décembre 01, Aristo*(1)
PM
Se savoir en limites des mondes explorés,
se savoir qu’il est maintenant à ce jour nouveau monde qui
ne nous est pas connu, que Mental et Vital nous ont occulté, qui
n’attend que notre totale participation, celle de quitter nos forêts
sombres et bruyantes mais encore si sécurisantes.
Chemins allers-retours, deux pas en avant un pas en arrière, quatre
pas en avant et … jusqu’à ce que l’élastique
se détende tant et tant qu’il se distende et n’ai plus
de force pour nous empêcher de plonger cet inconnu qui n’attend
que ça, qui appelle et aspire autant qu’il se peut de se
vivre, d’être vécu, d’être enfin reconnu
le connu qu’il est, comme une soif de tout temps qui se peut être
étanchée de tant d’éternité.
Nous en sommes là, sur cette terre inconnue, en limite de notre
foi Saint Thomas des choses établies et de notre certitude et confiance
en ce tout autre que d’évidence nous savons là, puisque
ce chemin nous a mené là, et qu’il n’en est
pas d’autres qui se dessinent à notre percée.
Devant, le plein soleil et la plaine nue inondée de lumière,
devant, notre devenir, part de Destin qui pose déjà ses
pas certifiés de l’anticipation, préfiguration de
notre marche incertaine pérégrine encore inquiète
de tant de toujours…
Nous regardons derrière nous, toute cette prodigieuse marche humaine
noire-ombre du cœur forêt en lisière de notre expérience,
encore surpris et stupéfaits du fait, trajectoire lente et mesurée
du sens, ce porteur de souffrance et de rédemption. “Perméation’’
douloureuse, décantation inéluctable au pas lent éléphant,
nos ombres se sont éclaircies des pauses clairières de l’Accompli.
Il est devant nous cette frange d’un déjà mi-obscur
des bois tendres et joyeux, il est devant nous cette immensité
nue engloutie de lumière, sans paysage apparent ; il est ces temps
du regard encore aveuglé qui se collent aux paupières, il
est cette mémoire d’une trajectoire peuplée des fantômes
d’une réalité vécue qui laisse trace en blessure
du temps, il est ce soleil plein ciel qui nous intimide et nous émeut,
il est cette nuit plein-bois, cette sombre nourrice sylvestre qui nous
“gesta’’ et nous mena le pas.
Il n’est que pas à faire !
(1) ARISTO : hôtellerie de Pondicherry.
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