Dimanche 22 juillet
01, VARANASI,(Bénarès) Un soir d’âme
en arrivée d’Inde (suite)
“Karmique’’
de l’Inéluctable, le Destin se faisait prince et quémandeur,
le Temps son frère, s’accorda à sa volonté.
L’âme frappée de cette Nécessité, se
sentit pénétrée d’une onde sourde, à
la sensation d’une vague des grandes profondeurs qui se remonterait
des abysses noires du néant et falsifia le regard de lumière
et de paix. Les temps étaient en marche, le choix était
fait, l’énoncé d’un pacte ancien formulé
tant avant, l’ignorance aveugle d’un Inaccompli jadis sur
les rives d’un fleuve d’eau et de terre. L’âme
savait, cette particule d’essence pure du Blanc le plus fluide
savait de tout temps qu’elle était la porteuse d’une
« autre chose », d’un Devoir en quelque espace pourtant
si opposé à sa Nature d’être. Elle se savait
Une, totalement une, dans l’accomplissement d’un Impossible,
d’un Inconcevable. Elle se savait Une dans le Deux et ne se pouvait
trouver sa complète béatitude sans unifier ce duel, pourtant
si éloigné encore de Sa réalité.
Particule de lumière en quête d’une “aimance’’
qui lui était si douloureuse à percevoir en réalité
de ses fibres si tant tissées d’or et de cobalt pur. Un
frémissement la parcourut toute entière, déjà
avertie en ses fibres intimes de sa mission au sens diffus ; une joie
immense traversa l’amble de sa Nature, et une douleur tout aussi
intense la pénétra jusques au cœur de son être.
Elle se savait l’annonciatrice d’une Vérité
encore plus grande inconnue jusqu’à ces temps de l’œuvre.
Il y avait tant de mémoires enfouies en les lames de sa brillance,
tant d’aspirations vaincues des mondes de l’Essai, tant
de chutes infinies qui se goûtent des feux d’un enfer de
l’Impuissance. Ce goût de terre, ce grain dérangeant
qui crisse encore de son propre cri de la crainte d’un Impossible
toujours manifesté. Sentiment d’une déviance attachée
au pas des ailes, l’Inaccompli.
De sa gloire triste entachée de l’incertitude, elle se
laissa “poroser’’ du sens secret du Devenir, toute
“connaissante’’ du Principe. De ce toucher du si lointain
venu, elle s’offrit ; l’impérieuse ambassadrice des
mondes quémandeurs se tenait là, hiératique et
présente, sans une once d’impatience. Elle parla de son
langage du silence, attentive à l’énoncé
de sa mission, soucieuse de la perfection de son dire ; en le silence
muet des circonvolutions se dessina un chant pourpre aux tonalités
insoupçonnables, compagnes “silenciées’’
du Rythme qui bat le Monde. Un cœur palpitant de vie sacrificielle
se forgea en cet espace matriciel, moule préfigurant du Chiffre
encore in-décryptable. Les ailes d’irisations flambèrent
des plus hautes intensités, et se fondirent en un Blanc immaculé,
l’offrande mariale faite à l’âme élue.
Une indescriptible Joie pénétra du Sens secret ce geste
; le temps d’une Révélation, le temps d’une
Connaissance absolue, le tracé certifiant d’une Geste,
l’Union, le temps d’une particule de l’Eternel “enjourée’’.