Samedi 27 octobre 01, Samâdhi
– «
C’est une prophétie attachée à mon âme,
‘Je suis celui qui n’a qu’une seule flèche’.
Je naquis avec le trait de cette destinée. C’est en cela
que tout se doit trouver sa juste place et que le monde se peut conserver
son équilibre. Je plonge ma pensée en les limites du Karma,
mon Maître. Je le vénère, car il est mon Destin.
L’acte n’a nulle importance, il n’est qu’un
acte de terre, l’action elle, est sous-tendue du regard des dieux
et ils s’en disputent les effets. Ma flèche est l’aboutissement
de ma Vie. Elle est le trésor inestimable que me firent les dieux
à ma naissance. Encore n’est-il pas un trait quelconque
; il est chargé de l’intention que le Seigneur lui-même
y plaça. Qui suis-je pour oser même y jeter le curieux
d’un œil ? Je le porte comme l’on porte un trésor
inestimable, il est ma source de vie et de joie cachée, il m’est
le compagnon de mes pas d’éternité sur les sentes
de cette terre foulée. Je goûte sa présence, elle
m’est douce et rassurante, elle m’oblige à la vigilance,
ma compagne pérégrine.
Maintes fois, je fus tenté de saisir mon arc d’if et d’y
planter l’empenne, maintes fois j’aurais pu de ce trait
tuer le diable qui hantait les branches de mes nuits du moment, j’en
aurais été débarrassé et la terre aussi,
mais après, à quoi cela servirait-il de se débarrasser
d’un démon quand il y en a des milliers d’autres
qui frappent à nos portes ? Mon être s’est aguerri
aux coups et j’ai appris l’esquive et la rencontre —
mon adversaire est devenu mon compagnon, il est mon Ange-gardien déguisé,
même avec ses grimaces les plus répugnantes et repoussantes
qu’il se peut prendre — , la jeune peur m’a fait affûter
la pointe de mon fer et je l’ai passée et repassée
maintes et maintes fois au rouge-cramoisi du feu pour lui donner plus
de nerf et de force et de pouvoir. Il est comme un feu, comme un éclair
d’Indra, il a le Pouvoir et même les dieux le craignent.
Mon ascèse lui a donné le fil du tranchant qui ne peut
s’émousser, la pointe se peut percer la cuirasse la plus
épaisse et la plus résistante. Peu m’en chaut ces
caricatures grotesques qui se présentent à moi espérant
une mort glorieuse en leur faisant la faveur de mon trait unique ? La
Vie est une grâce, il ne peut être gaspillé ce don
si lourd du Sens, nous sommes appelés à jouer un rôle
sur cette terre en ce monde du Temps, chacun à sa mesure, ou
à la mesure de sa destinée, qu’y puis-je ? Je contemple
et admire la sagesse de mon Créateur, je me plie à ses
ordres et volontés les plus secrètes, je mange ma famine
d’avec mes larmes et je combats mon frère du moment d’avec
mes seules forces. Chaque jour la joie m’habite davantage et chaque
jour l’adversaire grandit et je me sens plus petit ; et pourtant,
est-ce le métier des armes, je me sens de plus en plus fort et
prêt à affronter les géants. Mon trait est le garant
de ma force et de ma puissance, il est l’arme suprême