Samedi
3 novembre 01, Samâdhi PM
Lettre à une Auroville
Aujourd’hui
le goût d’une amertume…
Pourtant le rêve est joli — la nature de cette CITÉ
est luxuriante et généreuse à souhait, les êtres
paraissent … souriants et intériorisés et…
et puis quoi ? Il y a toujours ce goût de quelque chose qui n’est
pas en place, quelque chose qui ne trouve pas sa place, peut-être
en le cœur, en l’âme ?…
Toujours la même chose, à chaque fois que j’arrive
là, il y a ce hic qui me fait trouver le ‘VIVRE’
tout à coup difficile. Suis-je donc un cas ? Il me semble qu’il
n’y ait que moi qui ne ressente cette douleur sourde de ce manque…
manque, manque, encore et toujours de cette Vie que je sens là,
juste derrière, derrière quoi ?… derrière
à quelques transparences de voiles chamarrés, mais qui
manque si cruellement ! La Terre donne à voir sa Lumière,
les fleurs se donnent sans fin et vivent le pillage systématique
de leur beauté, se faut-il ne pas être beau pour pouvoir
continuer à vivre de fraternité d’un peu de soleil,
de mousson et de compagnie d’humanité ?
Mais que donnent donc les hommes de cette CITÉ ?
Pourtant, pourtant, ces humains, ils ont cette mémoire du minéral
jusqu’à l’animal en eux, et ils “prédatisent’’
hardi tiens bon jusqu’au manque de regard à l’“autreté’’,
cette vie qui est là juste à côté, cette
vie qui, de surcroît, les côtoie de différence, cette
différence qu’ils ne peuvent AS-SI-MI-LER !
Manque de connaissance et de reconnaissance… toujours et encore
le même vinyle rayé, la même rengaine. Tout s’objective
encore et toujours, la leçon de l’Orient n’a pas
encore fait ses preuves ici, n’a pas réussi à percer
la croûte d’ego de ce manque d’attention à
l’autre, à ce qu’il est, en ce qu’il développe
si singulièrement de mondes, les êtres ne se sont pas “perméés’’
de l’Immense qui les porte, les touche d’un quotidien encore
sans doute … trop quotidien.
Alors, la formule magique – « Mère a dit ! »
oui, Mère a dit, le ‘TOUT-VIVANT’ a dit — entre
nous ils ont dû en dire trop ou pas assez — mais vous, oui
vous, pourquoi regarder derrière, qu’avez-vous fait ? Ils
ont dit ce qu’ils avaient traversé et expérimenté,
pas après pas, ils ont dit ce qu’ils pouvaient assumer
de vérité et en conscience, mais vous, quel est ce bouclier
brandi en avant du : – « Mère a dit ! » ? Ce
manque de courage d’aller en soi, ce besoin d’aller mettre
en avant ce que vous ne créez pas par vous-mêmes en vous-mêmes
pour vous-mêmes, cette crainte de vous tromper en évitant
même d’essayer, cet étendu d’une vérité
éculée de formalisme qui n’en est déjà
de ce fait plus une, ce voile des mots et des clichés qui cachent
une impuissance et l’orgueil de la suffisance mentale ? Ce Manque
est un TROP !
Et cette stupidité à laquelle ce rêve me mène,
ce conseil des ‘sages’ qui… — intuition, dit
‘Cosmopolitan’*(1) …